MARCEL DUCHAMP

 

Le site du centre Pompidou et le dossier pédagogique Marcel Duchamp.    1   et   2

 

Une présentation sur le site de l'I.N.A par Judith Housez 

 

Un lien vers des ressources multiples sur EDUSCOL.

 

Marcel Duchamp en podcast  sur France Culture  1    2    3    4     5      6

 

 

L'histoire de Marcel duchamp est celle d'un jeune homme qui après un apprentissage traditionnel, renonce aux contraintes du monde artistique, ses salons, ses  jurys pour ouvrir une démarche de création inédite.

 

En affirmant un caractère plus nihiliste, Duchamp s'orientera vers une création décalée détournant les codes artistiques de son époque et marquera durablement l'art du XXe et du XXIe siècle.

 

I )DUCHAMP, DES SOURCES: curiosités ludiques et culture.

 

a) Les sources artistiques:

Symbolisme.

Cubismes.

Arts incohérents.

Littérature.

 

Duchamp s'intéressera aux expériences Cézanniennes, fauvistes puis aux essais cubistes du groupe de Puteaux dont font partie ses frères Raymond Duchamp-Villon et  Jacques Villon. Il s'intérèsse aussi au thème du mouvement en même temps que le  Futurisme italien .

 

Par la suite, il lira la nouvelle de l'EVE future de Villiers de L'Isle Adam narrant l'histoire d'une femme mécanique qui préfigure ses propres explorations artistiques du nu.

 Il découvrira également enchanté le théatre de Raymond Roussel avec Impression d'Afrique, oeuvre fantaisiste  marquante composée par jeux de mots, écritures automatiques et procédés aléatoires.

Marcel duchamp sera aussi un grand lecteur d'auteurs symbolistes dont Stéphane Mallarmée, inventeur du poème Un coup de dés jamais n'abolira le hasard (1914) propose une lecture à pistes multiples.

 

Duchamp lira avec plaisir les écrits de Gaston de Pawlowski et surtout Voyage au pays de la quatrième dimension.

Ce livre critique le progrès en évoquant les androïdes, la reproduction artificielle, le biomécanisme et les espaces parallèles  que nous retrouverons ensuite dans la Mariée mise à nu par ses célibataires même.

 

Duchamp sera également attiré par des sujets humoristiques comme l'almanach Vermot, les caricatures journalistiques et surtout les expériences décadentes des arts incohérents ( manifestations éphémères de parodies artistiques à l'esprit potache de la fin XIXe).

 

b) Les sources diverses.

Sciences, mathématiques et quatrième dimension.

Formes ludiques.

 

Duchamp fait souvent référence à des sources non conventionnelles comme l'univers ludique des stands de fêtes foraines à propos de la mariée, les vitrines pédagogiques vues en Allemagne pour Etant donné. Il est fasciné par les livres de Tom tit, la science amusante.

 

Duchamp s'intérèsse aussi à la géométrie non-euclidienne d'Henri Poincaré.

Ses théories supposent un espace-temps fusionnant  passé et présent; chaque corps déplacé laisserait alors une trace physique de son déplacement, produisant ainsi un nouvel espace, lui-même démultipliable à l'infini.

 

 Duchamp aura surtout une connaissance poétique de ces théories dans la lecture romancée de Gaston de Pawlowski.

Le mouvement, la vitesse et l'espace seront des thèmes centraux de son oeuvre ( le nu descendant un escalier, grand verre, etc).

 

Il s'interessera surtout à la décomposition photographique du mouvement avec les  chronophotographies par Jules-Etienne Marey ou les séquences de Edward Muybridge.

 

II) DUCHAMP EN LABEURS: devenir artiste?

 

Marcel  suit à Paris les cours d'art Julian mais c'est surtout auprès de ses frères et le groupe de Puteaux qu'il se forme aux  courants modernistes: Fauvisme, Cubisme, Symbolisme.

 

Il travaille pour pouvoir exposer aux Salons. 

On peut observer une évolution de son style et du savoir-faire:

 

La question de la couleur:

A l'origine, les oeuvres de Duchamp sont traitées dans une facture impressionniste ou Cézanienne avec des touches affirmées. Progressivement il introduit des éléments plus expressionnistes avec des couleurs pures inspirées du Fauvisme mais aussi un travail du cerne coloré capable d'appuyer la puissance des surfaces chromatiques ( Portrait de M.Duchamp, 1910, Portrait de joueurs d’échecs 1910)

 

Puis peignant dans l'obscurité, à la lumière verdâtre d'un bec Auer (portraits de joueur d'échecs 1912), Duchamp découvre en pleine lumière des couleurs sourdes en gris colorés. Progressivement il developpe des clairs-obscurs cubistes très contrastés .

 

Ex:Yvonne et madeleine déchiquetées ,1911, Jeune homme triste dans un train 1911,Les joueurs d'échecs 1912, Le Passage de la Vierge à la Mariée, 1912, le roi et la reine entourés de nus vite 1912 , le nu descendant un escalier 1912.

 

La question du dessin et de la forme

 

Les formes de Duchamp jouent avec des cernes affirmés en périodes Fauviste ou Cézanienne. portrait de monsieur Duchamp

Puis Sonates en 1911, portrait de ses soeurs et sa mère, marque l'influence cubiste,la décomposition des figures, les contours fragmentés.

Il travaillera cette question jusqu'au  nu descendant un escalier de 1912.

 

Progressivement il exprime une démultiplication des figures où des signes graphiques en pointillés soulignent leur dynamisme.

 

La question de l'espace et du mouvement.

 

L'influence des mécanismes modernes et le rôle des chronophotographies sont fondamentaux sur la décomposition des figures en mouvement.

 L' espace inspiré par les règles de construction cubistes mêle la figure avec le fond comme pour ses études autour du nu descendant un escalier.

 La lumière concentrée sur les figures en clair-obscur affirme la présence du sujet en mouvement.

 

Avec humour, Duchamp peint le mouvement "scientifique" d'un moulin à café en 1911 pour décorer la cuisine de son frère Raymond-Duchamp Villon.

Il se représente démultiplié dans "jeune homme triste dans un train" qui annonce les versions de nu descendant un escalier ( version décembre 1911 et janvier 1912).

 

 

Sa pièce maitresse, Le Nu descendant un escalier n°2  est refusé au Salon des artistes indépendants en Mars 1912 en raison d'une absence de conformité au goût cubiste dicté par la Section d'or ( La décomposition scientifique du mouvement dérange moins que le titre qui laisse présager la venue d'une prostituée).

 

C'est aux Etats-Unis que Duchamp connaitra un succès scandaleux lors de l'exposition de l'Armory show destinée à faire découvrir l'art moderne européen à un pays encore très conservateur. L'absence de Picasso peu représenté par son marchand permit à Duchamp de créer un choc retentissant lui apportant une gloire dans les milieux intellectuels.

 

 

« Cette version définitive du Nu descendant un escalier, peinte en janvier 1912, fut la convergence dans mon esprit de divers intérêts, dont le cinéma, encore en enfance, et la séparation des positions statiques dans les chronophotographies de Marey en France, d'Eakins et Muybridge en Amérique. Peint, comme il l'est, en sévères couleurs bois, le nu anatomique n'existe pas, ou du moins, ne peut pas être vu, car je renonçai complètement à l'apparence naturaliste d'un nu, ne conservant que ces quelques vingt différentes positions statiques dans l'acte successif de la descente. Avant d'être présenté à l'Armory Show de New York en 1913, je l'avais envoyé aux Indépendants de Paris en février 1912, mais mes amis artistes ne l'aimèrent pas et me demandèrent au moins d'en changer le titre. Au lieu de modifier quoi que ce fût, je le retirai et l'exposai en octobre de la même année au Salon de la Section d'or, cette fois sans opposition. (...) Je me sentais plus cubiste que futuriste dans cette abstraction d'un nu descendant un escalier: l'aspect général et le chromatisme brunâtre du tableau sont nettement cubistes, même si le traitement du mouvement a quelques connotations futuristes. » Marcel Duchamp

 

 

Une autre phase démarrée avec  Le roi et la reine entourés de nus vite 1912  et conclue avec la Mariée mise à nu par ses célibataires même explore un style formel dominé par des figures mécanomorphes absurdes.

 

autres oeuvres de la série de 1912: Le roi et la reine traversés par des nus en vitesse, Passage de la vierge à la mariée, Mariée reprennnent tous le thème du mouvment et du corps mécanique.

 

III) SORTIR DUCHAMP DE L'ART: ETRE ANARTISTE

 

Cette déception oriente Duchamp vers une autre voie plus personnelle et critique envers l'art.

 

"On peut être artiste sans être rien de particulier."

 

 

a) Duchamp peine au goût 

 

Duchamp s'interroge sur la nature de l'art et rejette l'idée que l'art repose sur le bon goût:

"Un mauvais art est quand même de l'art, comme une mauvaise émotion est quand même une émotion."MD

 

Il abandonnera donc le jugement de goût: « Le grand ennemi de l'art, c'est le bon goût. »MD

 

Cette vision explique ses choix de jeu de mots permettant de créer selon des associations d'idées aléatoires.

Il orientera ses créations vers un détournement artistique du banal: objets, affiches, lettres,etc.

 

c)  Le faire mis à l'envers: tradition contrariée.

 

Duchamp visuel au champ conceptuel

 

Reprenant le principe de Léonard de Vinci selon lequel "arte e cosa mentale" ( l'oeuvre est une conception mentale), Duchamp condamne l'art dit "rétinien", c'est-dire dicté par le seul plaisir de la vue. Pour Duchamp, l'oeuvre d'art est de  nature conceptuelle.

 

Ses oeuvres volontairement énigmatiques et incomplètes demandent au spectateur des opérations mentales pour reconstruire une unité logique.

 

Les représentations conceptuelles s'imposent progressivement comme composantes artistiques au même titre que le dessin ou la couleur:

"Ce sont les regardeurs qui font les tableaux." selon Marcel Duchamp.

 

Sa principale invention est le READY-MADE qui révolutionne et désacralise la sculpture traditionnelle.

 

définition de READY-Made: détournement symbolique d'objet manufacturé banal à vocation artistique. 

 

Une interview de Marcel Duchamp sur le Ready-Made et l'oeuvre.

 

On cite souvent la définition du Surréaliste André Breton considérée trop réductrice par Duchamp :"objet usuel promu à la dignité d'objet d'art par le simple choix de l'artiste » (article Ready Made dans le Dictionnaire abrégé du surréalisme).

 

Cette idée oublie les diverses fonctions liées aux assemblages, dispositifs de présentation, jeux de signature, écritures, titres, etc.que nous préciserons. Elle diminue aussi la part du travail conceptuel qui conduit l'artiste dans sa production d'énigmes poétiques destinées à titiller le spectateur.

 

 

Canular, humour, Dadaïsme.

 

L'humour Duchampien questionne les genres traditionnels dans la lignée des arts incohérents ou de l'esprit DADA.

 

Ex: L'univers mécanique pour les études de nu autour du grand verre ou son rapport ludique à l'objet comme Roue de Bicyclette, Underwood, pliant de voyage

renouvelle l'idée de création.

 

L'écriture créative:

 

Par son écriture aléatoire, Duchamp produit des notes énigmatiques, des jeux de mots incitant divers détournements de formes et d'objets.

 

A l'exemple de Raymond Roussel ou des Surréalistes, l'écriture automatique génère des significations aléatoires ( en lisant ses notes, on découvre des jeux d'association, des inversions de sens, des allitérations,etc. ).

 

Le titre offre ainsi un décalage humoristique avec la forme: 

Fountain/ urinoir

Fresh widows (traduction veuve joyeuse) / fenêtre française ( traduction French Windows).

Objet dard/objet d'art

Rrose Selavy/ Rose c'est la vie/ Eros c'est la vie

 

Canular critique

 

C'est avec son ready-made canular "Fountain" que Duchamp fait du scandale un outil critique.

 

Le 9 avril 1917,désigné membre directeur lors de l'exposition de la Société des artistes indépendants de New York (SIA), il propose en secret un urinoir fabriqué par la société J. L. Mott Iron Works signé du pseudonyme de R.Mutt .

 

Contre un droit d'entrée de 6 dollars quiconque pouvait exposer mais l'oeuvre de R.Mutt fut pourtant refusée.

Duchamp organise avec le photographe Alfred Stieglitz une publication satirique "the Blind man" ( l'homme aveugle) pour défendre "Fountain".

 

L'oeuvre questionne le rôle des jurys et des spectateurs, pose la question du goût, de la valeur du savoir-faire et du concept.

 

 

 

Le faire et la tradition

 

"Peut-on faire des oeuvres qui ne soient pas «d'art»?"MD

 

La désacralisation de l'art rétinien passe par le ready-made ou l'assemblage. Rejetant les savoirs faires séducteurs artistiques, Duchamp favorise les procédés d'artisanat ou de mécanique industrielle.

 

On retrouve cette manière sèche dans le grand verre ou les ready-made comme la roue de bicylette.

 

Au salon de la locomotion aérienne de l'automne 1912, passant devant une hélice d'avion parfaite, le sculpteur Brancusi s'exclamait " en voilà une sculpture. La sculpture désormais ne doit pas être inférieure à cela!"  

Duchamp rajouta "c'est fini la peinture! Qui peut faire mieux que cette hélice?"

C'est l'idée de savoir-faire traditionnel que l'objet manufacturé questionnait ici.

 

Duchamp se mit à l'écart des formations artistiques de 1913 à 1915, préférant vivre en s'instruisant. Il se fit embaucher  à la bibliothèque Sainte-Geneviève où il consultait à loisir les ouvrages de philosophie, d'art et surtout des traités rares de perspective.

 

Couleur

"Le titre est une couleur apportée à l'oeuvre."MD

 

Dans la mariée mise à nu par ses célibataires même, Duchamp choisit de ne pas peindre lemétal mais de poser une couche anti-rouille.

 

Forme

Dessin

Lumière

Sculpture

Peinture

Modèle, original, copie, boites.

Photographie.

jeu de rôle, hétéronomie.

 

d) Les bonnes fréquentations.

Brancusi

groupe de Puteaux.

Dadaïsme.

Surréalisme.

 

 

e) Duchamp perché: stratégies de réussite.

 

Salon

Mécènes.

Amis, amies.

 

V) SIGNE DUCHAMP: LA  POSTERITE

 

Surréalisme

Néo-Dadaïste: Robert Rauschenberg, Jasper Johns

Pop art: Andy Warhol, Claes Oldenburg

Néo-Pop: Jeff Koons, Haim Steinbach, 

Op art: Victor Vasarely

Art cinétique: Calder, Jean Tinguely

Art conceptuel:  Joseph Kosuth, Sol Lewitt

Installation

art corporel: Orlan, Jana Sterback, Michel Journiac, 

Photographie conceptuelle. Cindy Sherman

 

VI) liste de vocabulaire d'analyse.

 

Analyse plastique.

 

Assemblage: objet, hétérogénéïté, texture, matière, mou, installation, ready-made.

 

Peinture: séquence, mouvement, plan, espace, transparence, cadre, fenêtre, perspective, fuyante, industriel, lumière, dégradé, reflet, ombre, dessin, forme, chronophotographie.

 

titre, note, mot.

 

Analyse conceptuelle:

 

art conceptuel,rétinien, concept, goût,banal, réel, spectateur, apparence, mimésis, symbolisme.